Le laboratoire Géosciences Paris-Saclay s’est doté d’un diffractomètre de rayons X dont la configuration offre la particularité de pouvoir focaliser le faisceau de rayons X jusqu’à une taille de 100µm. Ce nouvel appareil permet donc de répondre aux besoins de scientifiques pour comprendre précisément la composition de la matière. L’instrument est utilisé dans les domaines de l’environnement, la biologie, l’archéologie, la géologie ou encore des sciences humaines.

Étudier la croissance d’organismes, connaitre la composition d’un pigment de peinture ou analyser la composition de carottes sédimentaires sont autant de recherches que permettent les diffractomètres de rayons X. Si ces équipements sont communs dans les laboratoires de caractérisation, celui dont dispose depuis peu le laboratoire Géosciences Paris-Saclay (GEOPS1 ), situé à Orsay, est loin de l’être. Entre autres caractéristiques, il est notamment capable de focaliser le faisceau de rayons X jusqu’à une taille de 100µm. Une possibilité proposée dans très peu de laboratoires de recherche français et qui offre un intermédiaire entre la diffraction globale et celle très poussée permise, par exemple, par un synchrotron.

Un diffractomètre de rayons X est un appareil basé sur les rayons X, comme son nom l’indique, qui permet d’analyser la matière. En l’occurrence, celui acquis par GEOPS est utilisé pour étudier la matière inorganique. « Notre objectif est d’utiliser cet appareil pour pouvoir faire de l’identification de compositions minéralogiques d’échantillons, naturels ou de synthèse », ce qui permet de comprendre les caractéristiques et propriétés de la matière étudiée, résume Alexandra Courtin, enseignante-chercheuse Université Paris-Saclay à GEOPS et porteuse du projet d’acquisition de l’appareil.

Le fonctionnement d’un diffractomètre de rayons X peut être résumé ainsi : « Une source produit des rayons X, qui vont interagir avec un échantillon. Cet échantillon renvoi des rayons X qui sont analysés par un détecteur, explique Alexandra Courtin. Cela va nous donner un diffractogramme, c’est-à-dire un spectre de rayons X, avec différentes raies de diffraction qui sont caractéristiques de phases minérales. En fonction de la position de chaque raie, les scientifiques sont ainsi capables de déterminer quel matériau est présent dans l’échantillon. »

S’il s’agit là du fonctionnement classique des diffractomètres, celui de GEOPS présente plusieurs spécificités prisées par la communauté scientifique. « Notre configuration permet de focaliser le faisceau de rayons X et donc de descendre à une taille de 100 µm, explique l’enseignante-chercheuse. C’est peu courant, d’habitude le faisceau mesure quelques centimètres et on balaye tout l’échantillon ce qui n’en fournit qu’une analyse globale. Or, avoir juste un signal global n’est pas satisfaisant parce que nous avons besoin de savoir exactement où sont réparties les différentes phases minérales au sein d’échantillons souvent hétérogènes. »

Analyser directement un petit objet, sans préparation spécifique en amont

Pour obtenir cette précision, les scientifiques utilisent habituellement des grandes infrastructures comme le synchrotron SOLEIL, qui permettent des focalisations avec des tailles de faisceaux très petites. « Comme l’accès à ces infrastructures est limité et demande une préparation fine, nous avons décidé de nous doter de ce diffractomètre, qui nous permet d’avoir un intermédiaire entre ce qui est fait classiquement avec de la diffraction globale et ce qui est fait très finement avec un synchrotron, souligne Alexandra Courtin. Cela nous permet donc en quelque sorte de dégrossir notre travail afin de déterminer si une phase a un intérêt ou non à être étudiée avec des méthodes d’analyses localisées plus spécifiques. »

D’autant que la diffraction des rayons X n’étant pas destructive, la micro-focalisation offerte par le nouvel instrument de GEOPS peut permettre d’analyser directement un petit objet, une petite statue par exemple, sans préparation spécifique en amont.

Une autre spécificité de l’instrument de GEOPS est d’être doté d’un système de passage automatique des échantillons, ce qui permet de réaliser des analyses reproductibles sur des grandes séries d’échantillons et d’optimiser le temps d’utilisation. Ce diffractomètre permet donc de répondre aux besoins de scientifiques dans les domaines de l’environnement, la biologie, l’archéologie, la géologie ou encore des sciences humaines. « Il y a toute une communauté d’utilisateurs avec des applications et des attentes différentes », souligne Alexandra Courtin.

Cette dernière travaille par exemple sur des problématiques de pollution environnementale générée par des métaux. « Cette identification minéralogique permet d’évaluer si la phase qui contient le métal critique peut poser problème ou pas », indique l’enseignante-chercheuse. D’autres scientifiques vont utiliser l’instrument pour entre autres pouvoir par la suite faire de la datation, analyser la composition de carottes sédimentaires océaniques, étudier la croissance d’organismes, ou encore connaitre la composition d’un pigment de peinture.

Ce nouvel instrument est opérationnel depuis avril 2023. Il a été financé par la Région Ile-de-France, via le DIM PAMIR, l’Université Paris-Saclay et le CNRS, ainsi que par les laboratoires partenaires du projet2 et la plateforme PANOPLY. Tous étaient réunis en juin 2023 pour l’inauguration de l’équipement.

Si les équipes de recherche partenaires ont un accès privilégié au nouveau diffractomètre de GEOPS, l’équipement est ouvert à tout la communauté scientifique. Pour cela, deux appels à projet vont être lancés courant 2024. « Concernant les utilisateurs, il y a ceux qui sont complètement autonomes pour utiliser l’appareil, ajoute Alexandra Courtin. Mais nous proposons également un support technique pour les utilisateurs extérieurs, notamment pour les analyses très spécifiques en micro-diffraction. » Ce nouveau diffractomètre de rayons X est d’ores et déjà très utilisé par les scientifiques et fonctionne 24h/24.

 

Notes
  1. CNRS/Université Paris-Saclay
  2. Géosciences Paris Saclay, Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE – CEA/CNRS/UVSQ), et Nanosciences et innovation pour les matériaux, la biomédecine et l’énergie (NIMBE – CEA/CNRS)