Quelle ampleur, quelles modalités, et quel impact aujourd’hui ?

Image : Histoire thermique du centre du bassin aquitain à partir de données traces de fission sur apatite (forage Caubon).

Le Crétacé inférieur correspond dans le nord-ouest de l’Europe à une période d’extension importante avec en particulier le rifting du Golfe de Gascogne, et immédiatement au sud de la plateforme nord-aquitaine, l’ouverture du bassin de Parentis. Ce sous-bassin enregistre une histoire relativement longue du rifting ainsi que plusieurs discontinuités importantes entre le sommet du Jurassique et l’Albien (au sommet du Jurassique, au sommet du Barrémien et à la limite Aptien-Albien). Sur la plateforme nord-aquitaine l’enregistrement sédimentaire est au contraire très lacunaire, les rares dépôts du Crétacé inférieur connus suggérant des conditions continentales pendant la majorité du Crétacé inférieur.

Afin de mieux évaluer l’impact de la karstification du Crétacé inférieur sur la plateforme jurassique, il est primordial de mieux contraindre son contexte : les variations de niveau de base, les déplacements verticaux, et plus généralement l’épisode géodynamique qui est à l’origine de l’émersion et d’en comprendre les modalités.

Des travaux réalisés plus à l’est (Bassin du Sud-Est, Cévennes, Causses, Quercy, Limousin) mettent en évidence des températures élevées pendant le Jurassique supérieur et le Crétacé inférieur qui ont été interprétées comme le résultat de la présence d’une pile sédimentaire significative (Barbarand et al., 2001 ; Peyaud et al., 2005 ; Barbarand et al., 2020 ; François et al., 2020). Des travaux préliminaires menés sur quelques forages profonds localisés sur la plateforme aquitaine (Pouillac, Caubon, Saint Martin Labouval, …) montrent également que les températures reconstituées par thermochronologie (traces de fission sur cristaux d’apatite) pour des formations triasiques ou permiennes ne sont pas en équilibre avec la pile sédimentaire actuelle en prenant un compte un gradient géothermique conventionnel (35°C/km). Tous ces travaux identifient ensuite un refroidissement important à la fin du Crétacé inférieur compatible avec un épisode d’érosion régional.

La quasi-absence de terrains sédimentaires du Crétacé inférieur dans le Bassin Aquitain questionne ces reconstitutions et deux modèles peuvent être proposés :

  • Le dépôt d’une série sédimentaire au Crétacé inférieur qui aurait été ensuite érodée à partir de l’Aptien. Cette hypothèse est en accord avec les reconstitutions réalisées plus à l’est et pourrait expliquer l’origine des paléotempératures élevées observées dans les formations détritiques de la base du Bassin Aquitain. Les faciès des rares dépôts du Crétacé inférieur et leur géométrie ne plaident cependant pas pour cette hypothèse.
  • Les paléotempératures élevées enregistrées sont contrôlées par une augmentation du gradient géothermique (un gradient de l’ordre de 50°C/km doit être envisagé) au cours du Jurassique supérieur et du Crétacé inférieur. Ce modèle n’envisage pas le dépôt puis l’érosion d’une épaisse couverture au Crétacé inférieur mais est difficilement explicable sur une aussi large zone qui ne semble pas avoir subi un amincissement crustal significatif. Il contraint par ailleurs l’érosion localisée entre le Jurassique supérieur et le Crétacé supérieur à une faible amplitude.

Ces deux hypothèses aboutissent à des situations paléogéographiques bien distinctes, et surtout à des amplitudes de déplacements verticaux très différentes impliquant des variations de niveau de base et donc une répercussion sur la karstification complètement différente. Dans le premier cas, lors de l’exhumation, la karstification va s’organiser en fonction de la chute du niveau de base et le décapage de la couverture sédimentaire. Dans le deuxième cas, la variation de niveau de base est vraisemblablement moindre, cependant le gradient géothermique élevé implique vraisemblablement des circulations de fluides particuliers induisant des modifications diagénétiques importantes et possiblement une karstification hypogène dont l’organisation n’est plus contrôlée par le niveau de base, mais par les zones de circulation de ces fluides.

Il est donc nécessaire de confronter ces hypothèses à d’autres données géologiques afin de répondre à ce questionnement.

L’objectif de ce projet est double : i) préciser le contexte géologique et géodynamique dans lequel se situe la plateforme nord aquitaine au Crétacé inférieur afin d’estimer les déplacements verticaux et la dynamique de l’érosion et ii) en déduire les répercussions de cet épisode sur les modalités de karstification.

Porteurs du projet

Eglantine Husson (BRGM), Jocelyn Barbarand (GEOPS)

Source de financement

BRGM